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l’antinomie politique

de Swift. M. Ostrogorski a bien raison de montrer que le système des partis « décourage, par le formalisme qu’il établit, l’indépendance d’esprit du citoyen, l’énergie de sa volonté et l’autonomie de sa conscience[1] ».

Joignez à cela la comédie des réunions publiques où l’on « fait » la salle, où tout est truqué et réglé à l’avance par des comparses. La réflexion personnelle, la lucidité d’esprit, l’indépendance du jugement sont des hôtes mal accueillis dans ces séances qui finissent généralement dans la plus horrible confusion. C’est quand personne ne voit plus goutte dans la discussion qu’on met la question aux voix[2].

L’individualisme est, en politique comme ailleurs, une protestation de l’individu contre les tyrannies de groupe. Nous distinguerons ici comme dans les chapitres précédents, deux espèces d’individualisme. Il y a un individualisme négatif, individualisme apolitique ou antipolitique, qui s’insurge contre toute organisation politique quelle qu’elle soit. C’est l’individualisme de Stirner ; c’est celui de Vigny pour qui la politique représente le triomphe le

  1. Ostrogorski. La démocratie et l’organisation des partis politiques.
  2. Parlant d’un récent « Congrès de la libre pensée », un publiciste écrivait récemment : « Ces mots hurlent de se trouver ensemble. La liberté ne fréquente pas les Congrès. Le propre des Congrès, c’est de voter des motions, des résolutions, d’imposer des solutions, toutes choses contraires à la liberté de la pensée ». (De M. Latapie, dans la République française.)