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toutes ces colonies est celui de collision entre le pouvoir exécutif et les représentants.

« Un tel état de choses indique une déviation de quelque principe constitutionnel. Quand nous examinons le système mis en œuvre dans ces colonies, il semblerait que l’objet de ceux qui l’ont conçu ait été de combiner avec des institutions populaires en apparence une absence complète de tout contrôle de la part du peuple sur les fonctionnaires. Ainsi le système représentatif a été élevé sur la base large et solide de suffrages si nombreux qu’ils équivalent au suffrage universel ; la réunion annuelle des représentans est voulue par des dispositions textuelles, et leurs attributions dans leurs provinces sont presque aussi étendues que celles de la chambre des communes en Angleterre. Mais en même temps la couronne voulait des revenus soustraits à tout contrôle et prétendait conduire le gouvernement à sa guise. Dans le Bas-Canada, du moment, où l’assemblée voulut faire usage de ses pouvoirs, elle se trouva aux prises avec l’exécutif. L’exercice de la liberté des débats dans son enceinte entraîna l’emprisonnement de ses membres les plus influents. Bientôt les nécessités du gouvernement le réduisirent à accepter l’offre de l’assemblée d’y subvenir par de nouvelles taxes ; mais pendant plus de 20 ans le contrôle lui en fut contesté : elle ne l’obtint qu’en 1832.

« Du reste, après cette reconnaissance de son droit, l’assemblée n’a pas été plus respectée qu’auparavant. Elle pouvait faire rejeter les lois, octroyer ou refuser les subsides, mais ne devait avoir aucune influence sur le choix d’un seul des serviteurs de la couronne. Il est même arrivé que le seul fait d’une hostilité connue contre la majorité de la Chambre a porté des personnes d’une incapacité notoire à des postes de profit et d’honneur. Les lois emportées après une longue résistance étaient livrées pour leur exécution à la foi de ceux qui les avaient combattues avec la plus opiniâtre animosité.

« Un gouverneur colonial, arrivant dans un pays qu’il ne connaît pas, est obligé de s’en rapporter à ceux qu’il trouve en place. Ils savent toujours le mettre, à son début, en collision avec le pays, et par là le jeter dans leur dépendance, —