Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

avoir lu dans ses yeux, et de ceux de sa jeune amie pour en avoir reçu la confidence, manœuvrait discrètement pour les rapprocher l’un de l’autre. Elle éprouvait de l’amitié pour Pierre. Pas plus. Elle ne l’aimait pas. Elle n’aimait personne. Esprit raisonné, elle était incapable de passion. Très pratique avec cela, voyant dans les choses le côté utilitaire. Elle formait un contraste vivant avec son frère, pour qui la vie se résumait dans une succession d’enthousiasmes. Cette différence provenait de ce que l’une avait le tempérament du père, l’autre celui de la mère.

Elle s’intéressait beaucoup à Claire. La voir heureuse, c’était s’accorder du bonheur à elle-même, surtout si elle pouvait contribuer à ce bonheur.

Elle savait que Tremblay, dès qu’il connaîtrait mieux la jeune fille, déplacerait l’axe de ses affections. Travailler à les rapprocher, c’était son but pour le moment, comme elle travaillait à rapprocher Pauline Dubois et Jules Faubert dont le seul obstacle entre leurs amours était l’orgueil immense du second. Son frère, sans se douter du rôle qu’on lui faisait jouer, l’aidait beaucoup dans la réalisation de ses vœux. De jouer à l’ange médiateur lui était une occupation agréable ; elle y prenait autant d’intérêt que s’il se fût agi de son propre sort.

Elle voyait peu à peu son œuvre se couronner de succès. Le financier était plus sociable et