Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/158

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Il fume sans relâche, noyant la pièce d’une fumée si dense qu’on la pourrait trancher avec un couteau.

De temps à autre il s’assied sur le divan ou sur une chaise ; il n’y reste que quelques minutes, et recommence sa même promenade, interminablement.

À l’intérieur de sa tête de minuscules marteaux frappent à coups réguliers, sur les parois du crâne, à l’endroit des tempes. Il sent dans tout son être physique un malaise indécis, quelque chose qui le fait étouffer.

Ses nerfs à fleur de peau, l’agacent.

Est-ce la réaction de la fête de tantôt ? La dépression qui suit les émotions trop fortes ?

Il y a un peu de cela.

Des bribes d’air lui reviennent à la mémoire, qu’il ne peut chasser et qui le poursuivent comme une obsession. Des bouts de phrases, des extraits de discours…

Ah ! comme il l’a vécu cette minute, depuis si longtemps attendue !

Cette foule de gens, personnalités marquantes dans la société, réunis autour de lui, à cause de lui, pour lui !

Il revoit la scène du banquet. Les tables multicolores encadrées d’êtres en habit sombre, où le noir de la chevelure se mêlait au gris et au blanc ; le parfum des fleurs ; les notes de l’orchestre, la lumière crue des candélabres. Puis ce furent les discours… et les convives entonnant,