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Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/59

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croisent, lui causait une sensation indéfinissable où s’emmêlait la volupté cruelle de souffrir par lui.

Combien de fois au sortir d’un bal où des jeunes hommes nombreux, comme des phalènes qu’attire la lumière, avaient tourné autour d’elle, lui était-t-il arrivé d’être la proie d’hallucinations, où lui, toujours lui, apparaissait dans sa supériorité complète.

Pendant que futilement elle dansait avec des gens futiles, il y avait un homme, quelque part, pas très loin d’elle, qui employait ses loisirs à rêver d’un avenir grandiose et à y travailler.

Elle aurait voulu associer sa pauvre petite vie à la vie magnifique de Jules. Drapé dans l’exaltation continue d’un rêve fou de grandeur, il préparait dans le labeur opiniâtre, ses destinées splendides. Tout cela, elle le savait, et qu’il y arriverait.

Par hasard, sur le journal qu’elle lit, elle vient d’apercevoir son nom. Un entrefilet sous la rubrique — déplacement — annonce qu’en ce moment, Jules Faubert est au Lac Masson pour une quinzaine, en repos.

Cette nouvelle lui fait battre le cœur.

Demain elle sera au Lac Masson, prétextant elle aussi un besoin de repos. Qu’il croit cette raison plausible ou non peu lui importe.

Ce qui importe c’est qu’elle arrive à ses fins !

Une chance inespérée vient de surgir !

En ce mois tranquille d’hiver, les campagnes du Nord, l’été, fourmillantes de touristes, deviennent vides et silencieuses.