Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/69

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cellente. Il garde pour son ami et patron une estime mêlée de reconnaissance. Sans lui, qui l’a forcé à des moyens radicaux de guérison, il serait aujourd’hui l’un des nombreux décavés qui traînent leur rêve mort par les rues et les tavernes, s’abrutissant graduellement jusqu’à la déchéance totale.

Sans volonté, ou presque, il aurait succombé. Infailliblement. Il est heureux qu’un autre ait voulu pour lui avec assez d’emprise pour s’imposer.

Dans sa place on le considère comme un grand homme. Son avis prime. Il s’est fait quelques relations agréables de gens cultivés dont le commerce fait oublier le manque d’amusement des pays neufs. Il aime la nature, la pêche, la chasse ; la forêt chaque fois qu’il y pénètre, l’enveloppe tout entier de quiétude et de bien-être.

À l’hôtel où il demeure on lui a donné la plus belle chambre ; chambre sommaire aux murs encore vierges de peinture, meublée aussi sommairement d’un lit et de deux bureaux très quelconque. Mais la propriété de ceux qui l’hébergent compense le luxe. Et puis… c’est la meilleure chambre. En comparaison c’est du luxe.

Pendant qu’il se prépare au voyage il revit son existence depuis l’été ; son odyssée au travers d’un pays de désolation, l’impression désagréable que les premiers postes habités lui ont causée, son découragement quand il s’est trouvé seul sans autre connaissance que l’agent de son patron.