Page:Paquin - Le paria, 1933.djvu/85

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forêt, isolés et libres, dans le voisinage unique des bêtes qu’ils pourchassaient et trappaient.

Jacques, cependant, regrettait la lumière de deux grands yeux.

Et pendant qu’il ramait à l’avant du canot, il revivait la scène de la veille et le goût courait sur ses lèvres de deux lèvres charnues, deux lèvres rouges et sensuelles.

— Un canard !… Ta carabine !…

Cet appel à la réalité l’arracha à ses réminiscences. Il déposa l’aviron, saisit la carabine qu’il tenait à portée de la main.

Une détonation ébranla l’air, se répercutant, affaiblie, dans le lointain boisé.

— J’pense que tu rêvais trop… Tu l’as manqué.

Comme pour les narguer, le canard évoluait au-dessus d’eux.

Une autre détonation.

Les ailes s’immobilisèrent dans leur vol, et l’oiseau s’abattit d’une masse dans la rivière. Le coup, cette fois, avait porté juste.