Page:Paris, Paulin - Lettre au traducteur de Fiéramosca sur les romans du Moyen-âge.djvu/8

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vez qu’Hérodote vaut mieux que Thucydide, et que notre bon Joinville est au moins l’égal de M. Thiers. Mais toutes ces vérités se conciliant dans votre esprit avec les idées nouvelles, je ne dois pas craindre d’ébranler votre foi robuste dans le système de perfectibilité progressive, en disant que le plus ancien des romans ne paraît nullement inférieur aux chef-d’œuvres de M. Paul de Kock. Je puis cependant me tromper.

Ce premier des romans est Tristan du Leonois. C’est l’imitation fort libre d’une ancienne épopée bretonne qui ne nous a pas été conservée. Luces de Gast, chevalier anglais, la fit passer, le premier, dans notre langue française, non sans y ajouter une foule de détails que l’original ne comportait pas sans doute. C’est donc messire Luces qu’il faut reconnaître pour le père des romanciers ; car les petites compositions de l’antiquité, décorées du même nom par les modernes, sont plutôt des pastorales ou des allégories mythologiques : elles n’ont pas la prétention de nuancer les accidens de la vie réelle de toutes les couleurs que l’imagination peut fournir ; or c’est là ce qui caractérise le véritable roman.