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laudandorum gesta sub silentio intacta reliquit, mentionem non fecit. Sed o laudenda et ubique terrarum prædicanda Arnoldi militia !.... qui humanam nullatenus quærens gloriam, scurræ maluit quantumcumque munusculum denegare, quam in ore scurræ et nomine indigni in orbe terrarum deferri et cum instrumento musicari vel decantari. Sed cum ignominiosus ille cantator nomen Arnoldi extinguere curavit, accensa lampade virtutum fama extulit et magnificavit. (Lamb. Ard. Chronica, p. 312.)

C’est un malheur pour Arnoul le Vieux que ces lampes dont parlait son petit-fils n’aient pas éclairé Tudebode, Foucher de Chartres, Raymond d’Aguilers, Albert d’Aix ou Guillaume de Tyr. Mais pourquoi le pèlerin Richart est-il ici présenté comme responsable de l’oubli général ? Lambert, qui se plaisait tant à citer Ovide, Horace et Lucain, ne pouvait ignorer que des savants clercs avaient également écrit l’histoire de la première croisade en témoins oculaires. Lambert, quand il s’en prenait à la Chanson d’Antioche, était donc persuadé que son auteur avait dû connaître, aussi bien et même mieux que personne, les hauts faits dont il avait cependant omis de parler dans sa chanson, in orbe terrarum cum instrumento decantata.

Rien dans le cours du poëme ne vient affaiblir la force des témoignages ici réunis pour constater la contemporanéité de Richart et de la première croisade. On ne trouve pas, même dans la forme renouvelée, un vers qui nous conduise au delà de l’année 1100. La plus récente allusion a trait à l’élection de Godefroi de Bouillon ; encore pourrait-elle être une addition de Graindor. Mais en accordant qu’elle appartienne à l’œuvre originale, elle prouvera seulement que Richart aurait assez vécu pour assister au triomphe complet des Croisés, et que ce ne fut pas la mort qui l’aurait empêché de mettre la dernière main à son ouvrage.

Toutefois, j’ai peine à croire qu’il ait vu le comte Étienne de Blois reparaître en Orient, pour y faire oublier la honte dont il s’était couvert à Antioche. Ou, dans ce cas, il faudra