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VOYAGE DE MORDRAIN.

Garde-toi mieux à l’avenir de tels artifices. »

Le bel homme disparut, et la nef vogua sur les flots, pendant deux jours et deux nuits. Le troisième jour, Mordrain vit approcher un homme que deux oiseaux soutenaient à fleur d’eau ; cet homme, en les abordant, fit sur la mer un grand signe de croix, puis de ses deux mains arrosa toutes les parties de la nef. « Mordrain, » dit-il, « apprends quel est ton gardien, de par Jésus-Christ. Je suis Saluste, celui qui te doit une belle église dans la ville de Sarras. L’Agneau me charge de te découvrir le sens du dernier songe que tu as fait, avant de quitter tes États. Tu vis jaillir de la poitrine de ton neveu un grand lac d’où sortaient huit fleuves également purs et limpides ; puis un neuvième plus pur et plus grand que les autres. Un homme de la semblance du vrai Dieu crucifié entra dans ce lac, y lava ses pieds et ses bras. Du lac il passa dans les huit premiers fleuves, et, quand il vint au neuvième, il ôta le reste de ses vêtements, et s’y plongea tout-à-fait. Or le lac indique le fils qui naîtra de ton neveu, et que Dieu visitera toujours, en raison de ses bonnes pensées et de ses bonnes œuvres. De ce fils descendront en droite ligne et l’un de l’autre huit personnages héritiers de la bonté de leur premier auteur. Mais le neuvième