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LE ROI ARTUS.

gne dans celles de Romanie : car il est avant tout homme des bois. En ce temps régnait Julius César : non celui qu’un spectre tua en Perse dans son pavillon[1], mais celui que devait immoler Gauvain, dans la bataille qui sera livrée près de Langres, à la fin du règne d’Artus.

Cet empereur avait une femme de haut lignage et d’assez grande beauté, bien qu’elle eût le teint et les cheveux approchant de ceux des rousses ; mais ses mœurs étaient des plus abandonnées. Elle avait réuni douze beaux damoiseaux qui, sous des habits de femme, la suivaient à titre de filles d’honneur. Toutes les fois que l’empereur s’éloignait de Rome, l’ « emperière » partageait sa couche avec un de ces beaux varlets : et pour empêcher que la barbe ne leur vint, elle leur faisait graisser le menton d’un mélange de chaux et de piment détrempé dans l’eau. Comme ils portaient de longues robes traînantes, qu’ils avaient la tête enveloppée de guimpes, et les cheveux tressés à la façon des jeunes filles, personne ne soupçonnait leur sexe véritable.

Tel était le train de vie que menait l’emperière, quand la fille d’un duc allemand nommé Mathan, chassé de sa terre par le duc Frollo,

  1. Allusion à la légende de la mort de Julien l’Apostat racontée dans l’ancienne Chronique alexandrine.