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Page:Paris, ou le livre des cent-et-un, Tome VI, 1832.djvu/231

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Eugène, d’un coup qu’il me porta dans la poitrine, faillit me renverser, en agitant ses bras comme deux ailes pour s’enfuir. Sa grisette était alors à plus de vingt-cinq pas devant nous ; elle touchait presque à la porte Saint-Denis. Le malheureux ne l’avait pas vue passer. Je compris la brusque précipitation de son départ.

Cependant à mesure qu’il se rapprochait d’elle, sa course devenait moins pétillante. Tout-à-coup il s’arrêta pour marcher. Elle venait de détourner la tête.

Je les vis tous deux un moment cheminer côte à côte. Il me sembla qu’Eugène n’osait lui adresser la parole. Après quelques minutes, il se plaça tout-à-fait derrière elle, la suivant en silence, et la tête basse. Bientôt il arriva que, le roulement des voitures et le pas des promeneurs étouffant le bruit des pas d’Eugène, la grisette donna un léger coup d’œil par-dessus son épaule comme pour s’assurer si l’obstiné jeune homme était encore là. D’autres pourraient croire sur cet indice qu’Eugène était aimé. Bien fou qui s’y laisserait prendre ! une femme peut aimer à être suivie, sans aimer qui la suit.

La grisette ne tarda point à disparaître derrière la porte de son allée, cependant qu’Eugène, ravi en extase, restait béant sur le seuil de cette