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578 ŒUVRES DE PASTEUR

rabique, par injection intraveineuse chez le chien, ne préserve pas ultérieurement de la rage et de la mort, à la suite, d’une inoculation nouvelle de matière rabique pure, faite par trépanation ou par inoculation intraveineuse[1].

IX. Nous avons rencontré des cas de guérison spontanée de rage après que les premiers symptômes rabiques seuls s’étaient développés, jamais après que les symptômes aigus avaient apparu.

Nous avons rencontré également des cas de disparition des premiers symptômes, avec reprise du mal après un long intervalle de temps (deux mois) ; dans ces circonstances, les symptômes aigus ont été suivis de mort, comme dans les cas habituels.

X. Dans une de nos expériences, sur trois chiens inoculés en 1881, dont deux avaient pris rapidement la rage et en étaient morts, le troisième, après avoir manifesté les premiers symptômes, s’est guéri.

Ce dernier chien, réinoculé en 1882, à deux reprises, par trépanation, n’a pu devenir enragé.

En conséquence, la rage, quoiqu’elle ait été bénigne dans ses symptômes, n’a pas récidivé.

Voilà un premier pas dans la voie de la découverte de la préservation de la rage.

XI. Nous possédons présentement quatre chiens qui ne peuvent prendre la rage, quels que soient le mode d’inoculation et l’intensité de la virulence de la matière rabique.

Les chiens témoins, inoculés en même temps, prennent tous la rage et en meurent.

Ces quatre chiens comprennent le précédent, celui de la proposition X. Comme ce dernier, sont-ils préservés contre la rage par la maladie bénigne guérie, qui aurait échappé à l’observation, ou sont-ils réfractaires naturellement à la rage, si tant est qu’il y ait de tels chiens ? C’est un point que nous examinerons ultérieurement et prochainement.

Je me borne à ajouter que, l’homme ne contractant jamais la rage qu’à la suite d’une morsure par un animal enragé, il suffirait de trouver une méthode propre à s’opposer à la rage du chien pour préserver l’humanité du terrible fléau. Ce but est encore éloigné, mais, en présence des faits qui précèdent, n’est-il pas permis d’espérer que les efforts de la science actuelle l’atteindront un jour ?

  1. Ces résultats contredisent ceux qui ont été annoncés par M. Galtier, à cette Académie le 1er août 1881, par des expériences faites sur le mouton. [Galtier. (V.). Les injections de virus rabique dans le torrent circulatoire ne provoquent pas l’éclosion de la rage et semblent conférer l’immunité. La rage peut être transmise par l’ingestion de matières rabiques. Comptes rendus de l’Académie des sciences, XCIII, 1" août 1881, p. 284-285.]