Page:Pasteur - Recherches sur la dissymétrie moléculaire des produits organiques naturels, 1860.djvu/18

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Bientôt je fus conduit à la mettre dans tout son jour par une découverte très-inattendue.

IV.

Il est nécessaire que je place d’abord sous vos yeux une note fort remarquable de M. Mitscherlich qui fut communiquée à l’Académie des sciences par M. Biot. La voici textuellement :

« Le paratartrate et le tartrate (doubles) de soude et d’ammoniaque ont la même composition chimique, la même forme cristalline avec les mêmes angles, le même poids spécifique, la même double réfraction, et par conséquent le même angle des axes optiques. Dissous dans l’eau leur réfraction est la même. Mais le tartrate dissous tourne le plan de la lumière polarisée et le paratartrate est indifférent comme M. Biot l’a trouvé pour toute la série de ces deux genres de sels. Mais, ajoute M. Mitscherlich, ici la nature et le nombre des atomes, leur arrangement et leurs distances, sont les mêmes dans les deux corps comparés. »

Cette note de M. Mitscherlich m’avait singulièrement préoccupé à l’époque de sa publication. J’étais alors élève à l’École Normale, méditant à loisir sur ces belles études de la constitution moléculaire des corps, et parvenu, je le croyais du moins, à bien comprendre les principes généralement admis par les physiciens et les chimistes. La note précédente troublait toutes mes idées. Quelle précision dans tous les détails ! Y a-t-il deux corps qui aient été mieux étudiés, mieux comparés dans leurs propriétés ? Mais dans l’état actuel de la science, concevait-on deux substances aussi semblables sans être identiques ? M. Mitscherlich nous dit lui-même quelle