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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/154

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teresse, quelques intrus peuvent se glisser, pourvu qu’ils aient eu d’avance l’entrée de la maîtresse porte…

— Eh bien ! eh bien ! se disait le bon frère en se frottant les mains, me voilà blanc comme neige ! Sont-ils ici ou ailleurs ? Je n’en sais rien, écoutez donc ! N’ont-ils pas pu entrer avec le roi ? Moi je ne connais pas tous les fainéants qui suivent le roi ; je ne garde que la porte, les escaliers ne sont point à moi. S’ils sont tapis là-haut dans mon ancienne cellule, harnibieu ! j’en ai la conscience nette.

— Mauvais Normand ! reprit-il en riant et sans y mettre de fiel.

— Normand toi-même ! Eh là-bas !

— Avais-tu besoin de jurer harnibieu pour dire cela ?

— Harnibieu n’est jurer, mais si tu veux, mon bijou, mettons harni tout court. Je te fais cette concession pour ne te point fâcher.

— Et tu comptes en être sorti à si bon marché !

— Oui, ma fille…, feu le nain damné me donnera la paix, puisque j’ai rempli ma promesse, et ni prieur ni abbé ne me peut prouver maintenant que j’ai ouvert la porte à d’autres qu’au roi et à sa suite.

— Bon, bon, ne te vante pas trop ; tu as donc oublié l’histoire du barbier du roi Midas ?

— Je n’ai jamais su cette histoire-là.

— Veux-tu que je te la conte ?

— Avec plaisir.

— Le roi Midas…

Ici frère Bruno se raconta fidèlement à lui-même l’histoire du roi Midas et de son barbier, qu’il avait oubliée. Il se raconta cette histoire afin de se prouver que les choses les plus cachées peuvent être découvertes.

— Le roi Louis est comme Midas, dit-il ensuite en riant ; il a un barbier.

— Prends garde, malheureux !

— Je sais à qui je parle ; tu ne voudrais pas me mettre dans l’embarras. D’ailleurs je n’ai pas dit que le roi eût des oreilles d’âne.