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Page:Paul Féval L'Homme de fer.djvu/92

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dit-il ensuite, un jongleur plus habile que vous. Ce jongleur nommait son art ventriloquie. Il se couvrait le chef d’un casque comme vous faites présentement, et derrière la grille il feignait de conserver avec trois ou quatre lutins qui tous lui répondaient à tour de rôle.

— Le roi m’a-t-il fait appeler pour m’outrager avant de m’assassiner ? demanda l’Homme de Fer, qui se redressa fièrement sous son armure.

Et comme Louis XI ne répondit pas assez vite à son gré, il ajouta :

— Seul je suis dans la tente du roi et m’étant mis, comme je l’ai fait en apparence, à sa merci, je défie le roi !

Louis XI le considérait curieusement.

— Vous êtes à tout le moins un homme intrépide et vaillant, comte Otto, dit-il. On m’accuse par le monde d’être superstitieux et craintif touchant les choses magiques qui dépassent l’intelligence humaine ; à l’occasion, vous pourrez témoigner du contraire. Si je vous donne le cordon de Saint-Michel, quand me livrerez-vous François, duc de Bretagne ?

— Aujourd’hui, à l’issue des joutes.

— Donc, vous serez chevalier de mon ordre, comte Otto Béringhem. Mon œuvre est juste, chrétienne et agréable à Dieu : la fin excuse les moyens.

— Aurai-je un gage ? demanda l’Homme de Fer.

Louis XI ne se fâcha pas. Il prit le parchemin où les noms des quatorze premiers membres étaler inscrits.

— J’allais écrire ici, dit-il, à la place quinzième, le nom de M. Tanneguy du Chastel ; je vous donne sur lui la préséance.

— Quitte à voir plus tard ajouta-t-il mentalement.

Et il écrivit en toutes lettres, au rôle d’institution, le nom du comte Otto Béringhem, seigneur de Chaussey[1].

— Le roi n’a plus rien à m’ordonner ? demanda l’Homme de Fer.

— Si fait. J’ai donné un gage, je veux un gage.

  1. Au quinzième numéro du Rôle royal il y a une rature. On a dit, nous ne l’affirmons point, que les premiers feuillets sont de la main du roi.