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Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/15

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sions encore, où les femmes non-seulement étaient admises comme aides, mais pouvaient avoir la maîtrise. Bien plus encore, dans certains métiers, les femmes avaient accès aux dignités de la corporation. On sait que chaque corporation avait des chefs portant le nom tantôt de maîtres de métier, tantôt de prud’hommes, tantôt d’élus. Il y avait des professions où ces fonctions pouvaient être données à des femmes. Les artisans de tissus de soie, par exemple, avaient trois maîtres et trois maîtresses : les tisserandes de couvre-chefs avaient trois preudefemmes.

Un illustre historien, dans d’ardentes invectives sur la condition actuelle des femmes, s’est écrié : « L’ouvrière, mot impie, sordide, qu’aucune langue n’eut jamais, qu’aucun temps n’aurait compris avant cet âge de fer et qui balancerait à lui seul tous nos prétendus progrès, » Assurément, en écrivant ces lignes, M. Michelet suivait aveuglément l’impulsion irréfléchie de son cœur, plutôt qu’il ne consultait ses souvenirs d’érudit. L’ouvrière, dirons-nous, mot glorieux, que tous les peuples connurent, dès qu’ils eurent supprimé l’esclavage et la servitude. Le mot d’ouvrière, en effet, revient souvent sous la plume des législateurs des corps de métiers : « Nulle mesresse ne ouvrière de cest mestier (tissus du suic), puis qu’elle aura fet son terme, ne se pueent ne se doivent alouer à persone nulle queleque ele soit, se ele n’est mestresse du mestier[1]. » Le mot aprentice

  1. Registres des métiers, XXXVIII, 88.