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Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/21

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l’industrie linière n’employait que bien peu de bras : jusqu’à une époque très-avancée de l’âge moderne, les plus grandes dames couchaient nues et sans linge. Ce sont les croisades d’abord, puis la renaissance, qui commencèrent à raffiner les mœurs, à multiplier les besoins, à éveiller le luxe et, avec le luxe, le soin de la personne, à élever en un mot, selon l’expression que la langue économique moderne a empruntée aux Anglais, le standard of life, l’étalon de la vie ou le niveau des habitudes. Alors l’on vit naître et se répandre une multitude d’industries secondaires jusque-là inconnues, qui firent une grande demande de main-d’œuvre féminine. L’on vit le travail se diviser à l’infini. Les principales de ces industries modernes, qui donnèrent un si grand élan au travail des femmes, sont la dentelle, la broderie, la bonneterie, la fabrication de ces étoffes légères, la batiste et la mousseline, enfin les tissus de soie. De ces deux industries élégantes et aristocratiques, la broderie et la dentelle, la dentelle est celle qui prit le plus tôt un grand essor. Connue dès les temps anciens, florissante à Venise pendant le moyen âge, elle émigra au seizième siècle vers le Nord, se perfectionna en substituant le fuseau à l’aiguille et ne tarda pas à employer une main-d’œuvre considérable. Pour lutter avec le point de Venise on eut le point de France et le point de Flandre. Des édits somptuaires voulurent arrêter cette nouvelle et luxueuse marchandise. Après s’être efforcé de décourager cette fabrication délicate et toute fé-