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Page:Paul Leroy-Beaulieu,Le travail des femmes au XIXe siècle,1873.djvu/6

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de l’homme et de la femme découle une sorte de division naturelle du travail. Tels sont a priori les caractères de l’organisation familiale. Mais il s’en faut que dans la pratique des siècles l’on retrouve partout cette constitution de la famille et cette division du travail qui semble la seule normale et la seule régulière. À l’origine, et aujourd’hui encore chez les sauvages, le toit domestique existe à peine : la tribu est errante ; l’activité de la femme comme celle de l’homme se porte au dehors. L’homme poursuit le gibier et le frappe de ses flèches ; la femme, accompagnant le hardi chasseur, rapporte la proie sur ses épaules : à cet âge du monde, la femme, l’être faible, est le portefaix, la bête de somme. Dans une civilisation plus avancée, le toit domestique existe, mais il est étroit, délabré, il ne suffit pas à occuper la journée de la femme ; l’homme se trouve, de son côté, impuissant à sustenter la famille entière : la femme doit se livrer à un travail plus actif, à un effort plus long et plus soutenu. D’autre part, ce tout harmonique, ce corps en équilibre, la famille, est souvent rompu et disjoint par la destinée. Le membre le plus vigoureux est parfois enlevé par le sort ; le membre le plus faible, la femme, reste seule, réduite à ses propres ressources pour alimenter elle-même et les siens. Il lui faut alors quitter le foyer et remplacer l’homme dans les travaux du dehors. Ainsi cette organisation familiale, cette naturelle division du travail, que nous avons proclamée normale et régulière