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tachaient leurs ânes. Parmi eux il y avait un jeune garçon d’une figure aimable et dont les filles de Sorrente étaient fort occupées. On l’appelait Meneghe par abréviation de Domenico. Les voyageurs qui voulaient traverser la montagne et aller à Amalfi le choisissaient pour guide à cause de son visage honnête, de ses jambes infatigables, et de son répertoire de chansonnettes dont il savait tirer parti pour amuser la compagnie pendant le trajet. Il ne possédait au soleil qu’un âne nourri de l’herbe des chemins, deux caleçons de toile, un bonnet de laine et un antique manteau qui avait servi à ses ancêtres depuis trois générations. Avec cela, il était plus heureux que Lucullus, faisait la cour à toutes les jeunes filles, et marchait le poing sur la hanche, comme si le roi eût été son cousin.

Antonia s’arrêtait souvent au bosquet d’orangers ; la première fois qu’elle vit Meneghe passer dans le chemin creux, elle cueillit une orange qu’elle lui jeta sur l’épaule, puis elle s’enfuit. Le lendemain, elle recommença le