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ESCHYLE.

dernes d’une grâce attique, peuvent s’appliquer à cette jeune bataille, aube d’un jour rayonnant, fleur de pourpre d’un printemps sacré. Il y a de la primeur du bourgeon dans ses verts lauriers, il y a de la sève dans son sang fécondant et frais comme une pluie d’avril. Ce petit peuple qui se dévoue à la patrie commune, ces dix mille contre deux cent mille, qui marchent en avant sans regarder derrière eux, cette victoire qui semble divine tant elle est rapide, quel plus noble et plus pur triomphe ! La beauté du lieu s’ajoute à la beauté de l’action. C’est sur une plage sablonneuse comme une arène olympique, que les Athéniens courent à l’ennemi ; les montagnes et la mer l’encadrent : ici le camp, et là les vaisseaux. La tactique du combat a la simplicité des mouvements d’un lutteur ; l’héroïque tragédie s’ordonne selon les lignes des belles unités. Le Messager même ne lui manque pas ; il est représenté par ce soldat qui courut annoncer sa délivrance à Athènes, et tomba mort sur la place, en agitant sa palme, comme un coursier épuisé par l’élan d’un dieu. Marathon ne fut sans doute qu’une escarmouche auprès des grandes luttes qui suivirent, mais ce petit combat décida leur issue future. Il exalta et fortifia l’âme d’Athènes, il l’aguerrit aux épouvantes et aux chocs des masses. La Perse était vaincue pour la première fois. La vanité du nombre