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ESCHYLE.

rem, ce pourrissoir des dynasties de l’Asie, donna en lui son type absolu. Aucun sultan de l’histoire, aucun calife des Mille et une Nuits n’a mieux personnifié le souverain oriental que ce roi absurde et fantasque, vaniteux et vide, infatué de sa volonté et ignorant de l’obstacle, aussi capable d’une action généreuse que d’une atroce méchanceté, mêlant des mollesses de femme à des férocités de bourreau. C’est là le danger de la nature du « Barbare », comme les Grecs, malgré ses raffinements de luxe et de mœurs, appelèrent toujours méprisamment l’Asiatique ; il échappe au raisonnement et à la logique. Les sensations le gouvernent ; elles se succèdent, dans son cerveau, et s’anéantissent l’une par l’autre, avec une rapidité délirante. Il passe d’un bond de la clémence à la cruauté, de la confiance excessive au soupçon aveugle, de la présomption la plus arrogante à la plus basse prostration. Sa tête n’est point éclairée par une lumière fixe, mais par des éclairs.

Darius avait légué l’expédition contre la Grèce à son fils ; Xerxès hésita quelque temps à accepter l’héritage. Il semble qu’Ormuzd et Arihmane, les deux Génies lumineux et ténébreux de la Perse, aient pris, dans sa cour, une figure humaine ; l’un pour le retenir, l’autre pour l’entraîner. Mardonios qui convoitait la Satrapie de l’Hellade rabaissait