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SECONDE GUERRE MÉDIQUE.

mée d’Alexandre, assis au pied du figuier sauvage sous lequel il méditait le Néant divin.

Ce sentiment de la vanité infinie des choses, de l’abîme éternel qui nous engloutit tous, — « que nous ayons été berger ou que nous ayons été troupeau », — comme dit Firdousi, est particulier à la Perse ; ses poètes en ont toujours été pénétrés. Le spectre de la mort se dresse devant eux, même lorsqu’ils chantent la volupté de l’heure, en buvant du vin de Chiraz, sous te rosier d’où leur Bulbul lance ses mélodies à la lune. Xerxès était poète par moments, comme tous ces monarques rassasiés et blasés de l’antique Orient, qu’on voit, dans l’histoire, passer, par soudains contrastes, de la frénésie à la rêverie, de l’action furieuse à la contemplation religieuse. Leurs types se résument dans ce roi de Ninive qu’une fresque assyrienne nous montre respirant longuement, les paupières closes, une Heur de lotus, tandis qu’un scribe accroupi numérote des têtes coupées au seuil de son trône. — Plus tard Xerxès, dans une vallée de la Grèce, devint amoureux d’un platane à l’ombre duquel il avait dormi. Il le fit garder par un Immortel, et suspendit, en partant, à ses branches, comme aux bras d’une femme, des bracelets et des colliers d’or.