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ESCHYLE.
III

Les ponts avaient été solidement reconstruits cependant, avant de les traverser, Xerxès crut prudent de faire au Détroit amende honorable. Il versa des libations sur la mer, comme pour panser les plaies de la flagellation qu’elle avait subie, et l’encensa avec une cassolette d’or qu’il jeta ensuite dans ses flots.

Le défilé commença ; il dura, sans interruption, sept jours et sept nuits, malgré le fouet des chefs qui pressait la marche. Pendant toute cette campagne, on voit le fouet planer et le bâton s’agiter sur les armées de Xerxès ; elles avancent et elles combattent sous les coups. Excitation de mauvais augure : des hordes haranguées par le fouet manquent d’enthousiasme, l’élan imprimé par la bastonnade est sujet aux chutes. Les cris de cette meute flagellée, allant au combat comme à la corvée, durent rassurer quelque peu la Grèce. Démarate, un transfuge de Sparte, vendu à la Perse, le sentit sans doute, lorsque Xerxès lui demanda « si les Grecs oseraient seulement se défendre ». L’orgueil hellénique redressa son âme avilie, et le traître fit cette noble réponse : « Ô roi ! sache que la pauvreté est la