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ESCHYLE.

tion des deux guerres Médiques. Marathon et Platée, Salamine et Mycale ne sont point des batailles locales, circonscrites dans l’intérêt d’un peuple et dans les limites d’une contrée ; leur horizon est celui de l’humanité. Ce grand combat a été celui de la vie contre la mort, de la liberté contre l’esclavage, du droit contre la violence, du progrès contre l’inertie. L’immense Asie roulait sur le continent prédestiné, comme une mer ténébreuse, charriant vers lui ses dogmes stériles, ses tyrannies étouffantes, Un grain de sable, solide et lumineux comme le diamant, fit refluer cette tempête. Les races élues purent semer et cultiver la bonne terre qui, sans lui, aurait été irrésistiblement submergée. La « forteresse en bois » de Salamine fut l’Arche guerrière qui sauva le genre humain d’un nouveau déluge.

Que serait-il advenu si les Perses avaient triomphé ? Par une méprise prodigieuse, en marchant vers la conquête de la Grèce, ils croyaient illuminer l’Occident. Ne lui apportaient-ils pas leur Ormuzd, le dieu de la lumière, le Soleil vivant ? C’était chez lui qu’ils allaient vaincre son ennemi mortel et coéternel, le roi de la nuit, le sombre Ahrimane. Mais ce dualisme monotone et dur excluait toute émancipation et toute tolérance. Point de milieu entre le dieu splendide et le dieu sinistre, entre le ciel