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ESCHYLE.

Ce n’est pas tout, l’élément vital est aussi un Esprit sublime : avec les bienfaits physiques qu’il prodigue à l’humanité, il lui révèle les vertus morales. Des religions naissent dans le feu adoré lui-même comme une divinité primordiale ; il inaugure les autels et les holocaustes. Ce n’est point seulement dans le désert d’Horeb que Dieu apparut a l’homme à travers un Buisson ardent. Le Feu crée la famille en fondant le foyer ; il lui apprend à s’aimer en la groupant autour de sa flamme. Il habitue l’homme aux joies et aux devoirs domestiques, il asseoit entre l’étable et l’âtre, sa vie vagabonde. Le chasseur nomade, le pasteur errant, ont maintenant une étoile fixe qui, chaque soir, du fond des bois, de l’horizon des prairies lointaines, les rappelle à sa lumière et leur promet sa chaleur. Le feu initie la femme aux arts et aux industries domestiques, le bruit de son rouet accompagne ses doux pétillements. Elle se transfigure dans le cercle de ses reflets vacillants. Son rayonnement couronne sa beauté, ses rougeurs restent sur les joues de la vierge et la colorent de pudeur. Femelle hier, à présent jeune fille, sœur, épouse et mère, maîtresse de maison. Le foyer qui lui obéit la relève et en fait sa reine.

Il y avait autrefois des divinations par la fumée du feu des sacrifices : sa direction était un indice propice ou funeste ; on y démêlait les images flottantes