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LES MYTHES DE PROMÉTHÉE.

des choses à venir. Si quelque devin de ce genre d’augures avait existé dans les premiers âges, que de usions et que de prodiges il aurait vu tournoyer dans les spirales fumantes du premier flambeau ! Des sillons ondoyants d’épis, des navires glissant sur les flots, un tourbillon de guerres déchaînées, des trophées de lances et d’épées, de faux et de mors, des armures et des statues vaguement modelées, des vases de toute forme et de toute matière. — Il aurait pu y voir encore des familles entrelacées autour du foyer, des cités sortant de terre, avec leurs remparts et leurs tours, des cortèges de prêtres enveloppés du nuage d’encens des sanctuaires. — Et tout en haut, des groupes de dieux, de plus en plus vrais, de plus en plus justes, montant et se succédant dans l’éther.

Cependant que d’attentes et que d’efforts avant de conquérir l’élément céleste, de l’obliger à se fixer sur la terre, d’en faire un dieu et un serviteur irrésistiblement évoqué ? L’homme le voyait resplendir dans le soleil, darder et serpenter dans l’éclair, éclater dans les éruptions volcaniques et les incendies spontanés des bois ; il le sentait circuler en ondes invisibles dans l’atmosphère des jours brûlants. Mais l’astre était inaccessible, l’éclair était insaisissable, le volcan s’éteignait après avoir débordé, la forêt brûlait sur place et se résolvait en monceau de cendres ;