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Page:Paul de Saint-Victor - Les deux masques, tome 1.djvu/279

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LES MYTHES DE PROMÉTHÉE.

raient l’air. Médée, la sorcière tragique, herborisant dans les lieux sauvages, venait cueillir, au pied de son gibet, une plante qui germait de la terre rougie par son sang, pour en extraire des philtres terribles.

Cette plante tenait au corps du patient par des ramifications invisibles ; le fer qui la tranchait entrait aussi dans sa chair. Comme la branche de l’arbre du Dante, qui enfermait un damné, elle aurait pu crier, sous la faucille de la magicienne : — « Pourquoi me déchires-tu ? N’as-tu pas pitié ? »

Perchè mi scerpi ?
Non hai tu spirto di pictate alcuno ?

Le supplice de Prométhée, d’après le décret de Zeus, devait durer trente mille ans.

Hercule hâta sa délivrance. Il y avait sympathie native, fraternité d’âmes entre le jeune héros et le vieux Titan. Tous deux amis des hommes et martyrs des dieux, champions de la justice, combattants du droit, redressés contre les tyrans, inclinés vers les opprimés. L’un dérobant au ciel le feu salutaire, l’autre éteignant le feu ravageur dans la gueule des monstres qui le vomissaient. Le bienfaiteur appelait le libérateur. Hercule s’achemina donc, un jour, par les rochers et les précipices, vers la sommet où se tordait Prométhée. Il tendit son arc formidable, et il transperça l’aigle au vol, au mo-