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PROMÉTHÉE ENCHAÎNÉ.

l’on voit les nymphes entraîner, par ses jambes pendantes, le pécheur assis sur la rive, ou par son corps incliné, l’enfant qui plonge son vase dans les eaux du fleuve.

Toutes les divinités des eaux douces venaient se fondre, comme des affluents, dans l’immense famille des Océanides. Hésiode nous a laissé quelques-uns de leurs noms, qui reflétaient ta couleur ou qui exprimaient la qualité de leurs flots. C’étaient Callirhoé « celle qui a un beau cours » ; Rliodia et Ocyrhoé, « celles qui coulent rapidement » Xauthé « la jaune », Lanllié « la violette », Climéne « la murmurante », Télestô « au péplos teint de safran ». Les Océanides étaient parentes de Prométhée, qui avait épousé leur sœur Hésione ; elles avaient chanté, comme elles le rappelleront gracieusement plus tard, l’hymne d’hyménée, le soir de ses noces. C’est donc un allié qu’elles viennent visiter dans son infortune. Mais leur intervention exprime, en réalité, une idée plus haute, celle des âmes de la Nature émues du malheur de son plus grand fils. Aussi conçoit-on moins ces nymphes secourables sous la figure de femmes incarnées que sous celle des formes flottantes qui se modèlent vaguement sous les eaux. L’imagination renverse comme une machine d’opéra, le char aérien qui les apportait sur le théâtre d’Athènes ; elle amplifie la scène et elle la disperse. On voit une marée