la Médie, la Phrygie, l’Égypte, l’Arabie. Ammon, transformé en bélier, y mène aux sources d’une oasis son armée mourante des soifs du désert. Il franchit l’Euphrate sur un pont de sarments, il passe sur le dos d’un tigre, à la nage, le fleuve auquel sa monture donnera son nom. Il s’enfonce au cœur de l’Asie, et il en revient monté sur le chameau à deux bosses de la Bactriane, entouré de cymbalistes, de joueuses de flûtes et de bateleurs. À voir le vase peint qui représente ce triomphe, on dirait un beau Calife rentrant dans son sérail, au milieu de ses almées et de ses derviches.
Un nouveau monde s’ouvre devant Bacchus, il entre dans l’Inde, et l’imagination grecque mêlant plus tard l’expédition divinisée d’Alexandre à cette conquête fabuleuse, en composera un cycle éblouissant. Un poète du quatrième siècle, Nonnos de Panopolis, l’a célébrée dans les quarante-huit chants de ses Dionysiaques, répertoire immense de mythes et de fables enjolivés sans doute par ce bel esprit alexandrin qu’on pourrait appeler le rococo grec, mais dont la broderie romanesque recouvre un fond d’antiques traditions.
Bacchus a levé en masse les peuplades de son empire démoniaque pour envahir l’Inde. Il sait qu’il va combattre un pays terrible, des races innombrables, des rois portés sur des monstres dont le pied