Page:Peguy oeuvres completes 02.djvu/392

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principalement des conseils. Et je vois surtout que je m’embarrasse inextricablement dans ma traduction. Heureux temps de nos études, où dans de telles traductions nous ne nous embarrassions pas moins. Combien de fois, en cinquième, combien de fois, en quatrième, en troisième, combien de fois, en rhétorique même, combien de fois n’avons-nous pas bronché ainsi, combien de fois ne nous sommes-nous pas aheurtés sur un texte, sur deux lignes de grec, sur deux vers de Sophocle. Mais alors il y avait deux cas, et il n’y avait que deux cas, très nettement caractérisés, deux cas distincts, et même contraires, d’embarras inextricables : il y avait les fois où l’on comprenait parfaitement le mot à mot et où l’on ne comprenait pas le français, et au contraire il y avait les cas où l’on comprenait parfaitement le français, mais où l’on ne comprenait pas le mot à mot. Nul homme vivant n’était dupe de ces innocentes formules ; nul ne se trompait à ces habituels déplacements ; nul, ni nos bons maîtres, ni notre maître affectueux et cordial M. Simore, ni notre maître sévère M. Doret, qui s’écrivait peut-être Doré, ni notre regretté maître M. Paul Glachant ; nul, ni surtout nos bons camarades, qui parlaient le même langage conventionnel-indulgent, — le même langage usuel usager, de toutes les langues anciennes celle que nous avions apprise le plus vite, et celle que nous parlions, familièrement, commodément, le mieux : Monsieur, je comprends bien le français, mais je ne peux pas faire le mot-à-mot. — Monsieur, je comprends bien le mot-à-mot, mais je ne peux pas faire le français : Amant alterna Camenae, c’était le chant alterné des anciennes classes de grammaire et des anciennes classes de lettres dans l’enseignement secondaire, et ce chant,