Page:Peguy oeuvres completes 04.djvu/474

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tout de la guerre chevaleresque. Rodrigue serait déshonoré instantanément si contre le comte, dans un combat singulier, il usait d’une ruse de guerre ; s’il en usait autrement que contre les Maures et dans la grande guerre ; ce serait frauder le combat de Dieu. Cet héroïsme de la cité d’Horace, du jeune Horace et du vieil, sera promu dans Polyeucte en héroïsme de la cité céleste. C’est le même héroïsme qui est promu du registre de la patrie, de la cité terrestre au registre de la cité céleste. Cet amour, cette piété, cette religion de la terre, d’une terre devient l’amour, la piété, la religion du ciel. Tout ce qui est de la cité de Rome devient tout ce qui est de la cité de Dieu. Tout ce qui est de la cité terrienne, de la cité temporelle, de la cité charnelle devient tout ce qui est de la Cité intemporelle, de la Cité spirituelle, de la charnelle Cité éternelle. C’est toute une proposition, c’est tout un registre qui joue pour qu’un deuxième registre joue l’année suivante. Et par un choix unique, qui représente lui-même, dans ce triple faisceau, la plus grande vocation, la plus grande destination temporelle historique, politique temporelle, cette cité terrestre d’où ensuite nous partirons est en son origine la cité de Rome même, en un point, au balancement originel de sa fortune, la ville de Rome origine et germe et point de départ de l’Empire romain lui-même soubassement matériel, organisme matériel, charpente charnelle du monde chrétien. Charpente matérielle (pré)figurant le monde chrétien.

Et cette sorte de sainteté romaine, de sainteté sauvage qu’il faut bien voir qu’il y a déjà dans Horace. Dans le jeune. Dans le vieux.