Page:Peguy oeuvres completes 05.djvu/102

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tion ; et qu’ils en sont donc responsables. Comptables. Responsables des âmes qui se damnent à ces âmes elles-mêmes, et responsables à Dieu, car les âmes sont à lui, et vous les laissez damner sans rien faire, et vous vous damnez vous-mêmes à laisser ainsi damner les âmes de Dieu.

Un silence.

Ainsi c’est ainsi une énumération et un déroulement sans fin de damnations, une explication des damnations sans fin ; un enchaînement, une danse affreuse des perditions ; l’une entraîne l’autre, infailliblement ; l’une entraîne l’autre dans une ronde infernale ; l’une tient l’autre par la main comme une sœur affreuse ; et elles se tiennent d’une main qui ne se lâchera jamais. L’une tient l’autre, l’autre tient l’une, l’une tient à l’autre et l’une renforce l’autre. Tous les jours inventions nouvelles. Tous les jours imaginations inconnues. Nouvelles damnations, redoublements de damnation les cercles de l’enfer se déroulent au dessous des cercles.

Un silence.

Tu mens.

Depuis que tu as connu cela, tu es menteuse : Menteuse à ton père, menteuse à ta mère, à tes frères, à ta grande sœur, à tes amies, car tu fais semblant de les aimer, et tu ne peux pas les aimer. Et pourtant tu les aimes tout de même. Menteuse à toi-même, car tu veux te faire croire que tu les aimes, et tu ne peux pas les aimer. Et pourtant tu les aimes tout de même.

Tu ne les aimes pas et pourtant tu les aimes.

Tu les aimes tout de même. De quelle amour. Com-