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ŒUVRES POSTHUMES

être de ce que je n'avais pas calculé d'où elle viendrait. Quand l'éternelle source ressort d'une sourde infiltra- tion, vais-je déclarer que je trouve indigne, moi, indigne d'elle qu'elle sorte de là, comme une eau per- due. Et dois-je m'en réjouir, enfin, ai-je le droit, ai-je la liberté de m'en réjouir. Ou dois-je me contrister, pour plaire à quelques misérables dévots, que Dieu revienne par où je ne l'attendais pas. Oui le monde moderne a fait de moi une misérable idole. Mais qui sait si je ne reporte pas en leur lieu ces vaines adora- tions et si je ne les fais pas suivre. Il y a peut-être des prières qui sont mal adressées et qui arrivent, bien, tout de même. Et il y a des mouvements du cœur mal destinés qui arrivent peut-être directement où il faut par un système de messageries particulièrement accélé- rées. Ces adorations stupides que l'on me fait, qui dit que je les garde. Ces invocations saugrenues et ces appels à ma justice, qui dit que je les garde. 11 faut se méfier de la grâce, mon enfant. Il faut se méfier même de moi. Je suis très capable de redétourner ce qui avait été détourné premièrement. Elle fait faire ce que l'on ne veut pas faire, mon ami, et elle fait arriver du pied que l'on n'était pas parti. Moi-même aujourd'hui mon enfant ce n'était pas de la grâce que je voulais vous entretenir, et aujourd'hui jeudi 15 août jour de l'As- somption, (car à force de parler on en était venu jus- qu'au jour de l'Assomption), ce n'était point pour vous parler de la grâce que j'étais partie et que je faisais inconsidérément route étant partie de Beaumarchais et

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