Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/106

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des voix de Jeanne d’Arc on ne parle point vaguement, on ne veut point dire des extériôrisâtions de sensâtions, on ne parle point le langage de l’école, on fuit non seulement le langage mais la pensée de l’École, on est à cent lieues de la parole intérieure et de ce pauvre M. Egger. Il ne s’agit point d’objectivâtion et de projection au dehors et de tout le tremblement. Il ne s’agit point de sortir tous les appareils du laboratoire. On veut dire, il s’agit de saint Michel, de sainte Catherine, et de sainte Marguerite.

§ 189. — Il ne s’agit pas d’extériorisation de faits de conscience. Il y a des hommes, — et ils sont malheureusement devenus innombrables dans les temps modernes, — qui croient que les voix de Jeanne d’Arc étaient des hallucinations ; il faut dire le mot, ne reculons point devant le mot, et de même que nous avons employé le mot athée littéralement techniquement, sans une ombre d’injure, ainsi nous employons ici de notre côté le mot hallucination pour ainsi dire aussi sans une ombre d’injure pour nous. Des hommes qui sont malheureusement devenus innombrables dans le monde moderne croient que les voix de Jeanne d’Arc étaient des projections hors d’elle de ses propres mouvements du cœur, d’un courage, d’une race, d’une ardeur, d’une charité toute humaine. Ils croient qu’elle était une héroïne. Ils croient, malheureusement ils enseignent que les voix de Jeanne d’Arc étaient les extériorisations de ses états de conscience, les objectivations de ses faits de conscience ; un cœur ardent, brûlant de charité, qui pris dès la plus jeune enfance dans un système de théologie traduit, projette en ce