Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/117

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dans le monde chrétien pendant qu’il traverse la période moderne, pendant qu’il baigne dans le monde moderne il y a (faut-il dire encore ; il faut dire déjà ; il faut dire toujours) un très grand nombre de fidélités.

§ 222. — Combattues plus que jamais, battues de tous les vents de nombreuses fidélités fleurissent.

§ 223. — Que sera-ce des créances ; et proprement des fois. Quand on parle des âges de foi si l’on veut dire que pendant des siècles, qui étaient des siècles de chrétienté, qui étaient des siècles de la loi d’amour, qui étaient des siècles du règne de la grâce, anni Domini, anni gratiae Domini, la foi, la créance était commune, était pour ainsi dire et littéralement publique, était dans le sang et dans les veines communes dans le peuple, allait de soi, était pour ainsi dire de droit commun, recevait non pas seulement un assentiment mais une célébration publique, solennelle, officielle, et qu’aujourd’hui il n’en est plus de même on a raison. On a historiquement raison. On ne fait que constater, qu’enregistrer un fait historique. Mais ici encore il ne faut l’enregistrer qu’avec la plus extrême attention, il ne faut le manier qu’avec la circonspection la plus extrême.

§ 224. — Il est d’abord permis de se demander si nos fidélités modernes, — privées, monsieur Laudet, — forcément devenues privées, je veux dire non publiques en ce sens qu’elles ne reçoivent généralement plus la célébration publique, la célébration du peuple et de l’État, non solennelles, non officielles, c’est une ques-