Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/156

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Monsieur Reinach quand un parti intellectuel, quand un pouvoir spirituel temporel dispose du budget de l’État, de toutes les places de l’État, — (de toutes les hautes places et de toutes les places de Paris, laissant aux autres le soin d’aller enseigner dans de censément ingrates provinces), — quand il dispose de toutes les faveurs, de tout l’avancement, de tout le pouvoir, de tout l’argent, de toutes les relations, — (notamment des mariages, il y aurait un beau travail à faire sur l’accélération des gendres dans l’Université depuis trente ans), — (avant je n’y étais pas), — quand on dispose de tout il faudrait que l’on eût bien changé l’humanité depuis trente ans pour n’avoir pas avec soi quelques douzaines de jeunes gens ; — (et j’ajoute : quand on dispose de pouvoir casser les reins à quelques autres, à tous ceux qui ne marcheraient pas droit ; cela s’est vu ; cela se voit ; cela se verra).

Puisque M. Salomon Reinach est certainement pour les méthodes expérimentales, qu’il rouvre l’annuaire, moi aussi je suis pour l’expérience. Qu’il dresse les tables. Qu’il dresse les présences, les absences, les variations concomitantes. Qu’il compte, qu’il mesure les carrières que l’on fait, — (j’entends les carrières politiques et les carrières universitaires), — quand on marche avec le parti intellectuel, et celles que l’on ne fait pas quand on ne marche pas avec. Les plus hautes valeurs des différentes promotions reléguées, laissées en province, (le seul philosophe qu’il y eût dans ma promotion encore à Bordeaux après un tour du monde et je pense au moins dix ans du meilleur enseignement de lycée), et des galopins de vingt-cinq ans pourvus de chaires, pourvu qu’ils y enseignent ce qu’ils nomment