Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/160

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commence à nous emm..... avec Corneille et Racine. » L’homme qui prononçait ces paroles mémorables était l’un des deux fonctionnaires les plus permanents, les seuls permanents, de la maison, l’un des deux qui n’aient point bougé depuis vingt ans, l’un des deux qui usent directeurs, sous-directeurs et maîtres de conférences, comme on les nommait, comme on ne les nomme peut-être plus, l’un des deux qui usent les programmes mêmes, l’un des deux qui usent les « transformations ». Il était dès lors, il est encore dans la maison le délégué permanent du jauressisme, le représentant officiel de Jaurès dans la maison. Il y avait alors un fort parti. Il n’y a plus personne. Il n’y a plus que le directeur. Mais il l’a bien. Il était dès lors le dominateur et l’épouvantateur automatique de M. Lavisse. Il était alors le secrétaire de M. Lavisse à la Revue de Paris. Il épouvantait tous les deux jours M. Lavisse par des gros mots, par une de ces « engueulades » dont je me suis permis de citer un texte. À présent dans ce texte voulait dire : À présent que nous avons fini l’affaire Dreyfus ; à présent que nous allons être les maîtres ; à présent que ces jeunes gens vont continuer à nous suivre. Il voulait dire que nous autres jeunes gens nous allions employer notre victoire et notre force à démolir ce qui est la France même.

De tels mots forment la jeunesse. Nos anciens, nos aînés s’étonnent que nous nous soyons éloignés d’eux, détachés, qu’il y ait entre eux et nous, entre leur génération et la nôtre une coupure la plus profonde peut-être qu’il y ait jamais eu entre deux générations. Des hommes que nous étions le plus portés à respecter, à aimer, que déjà nous respections par provision, que