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Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/172

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quatre comptes rendus on arrive à la phrase suivante. Je préviens que malgré le jeu des premières métaphores, il ne s’agit point dans cette Revue critique de géographie marine ni d’un traité d’obstétrique. Il s’agit d’un livre d’un certain Cazamian sur l’Angleterre moderne. Voici la phrase : « [Il a essayé, et réussi, la synthèse de l’âme et de l’histoire anglaises depuis cent ans. Non plus l’une de ces synthèses psychologiques à la manière de Taine et de son école, qui ne sont que des portraits classiques agrandis à la taille des peuples, mais une synthèse historique, dans laquelle une connaissance étendue des faits en soutient et en nourrit l’interprétation.] » Voici le beau de la phrase, et les métaphores : « Il a évité les principaux écueils de sa conception. Sous le schéma philosophique il est aisé même à des lecteurs moyennement au fait des choses anglaises, de replacer le drame, avec ses angoisses. Mais le schéma lui-même ne crée point de rigidité. L’auteur ne fige pas la vie dans des constructions systématiques. Partout il donne à entendre qu’il n’existe point de tendances pures, sans mélange des tendances contraires, et qu’un peuple ne peut pas se jeter tout entier du côté de l’une ou de l’autre adaptation. Grâce à la variété nuancée et heureuse de ses formules, il a dégagé les dominantes, mais respecté la complexité profonde des choses. Aussi, quand on discuterait avec lui sur ses dosages de réflexion et de raison, ou même sur le rattachement de telle ou telle tendance à l’une ou à l’autre des adaptations, on n’ébranlerait ni l’ensemble de sa construction ni son idée générale, parfaitement légitime quoiqu’appliquée rétrospectivement au siècle passé. »