Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/258

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niaisement et faussairement, — et faussement, — puisque c’est se condamner à parler un langage impropre, — que d’écrire la chevaleresque Jeanne d’Arc. C’est vraiment faire exprès la confusion préalable des plans de langage. Ou bien on veut dire confusément, on veut dire mollement la chevaleresque Jeanne d’Arc en un sens vague, en un sens lui-même confus et mou de généreuse. Et alors c’est une expression pour comice agricole. Et encore on ne l’aurait pas soufferte à la distribution des prix à Trie. Et c’est certainement en ce sens que l’entend et que le dit M. Laudet. Et alors il ne peut rien dire. Et il ne veut rien dire. Et il ferait mieux de se taire. Et de ne pas intercaler Jeanne d’Arc dans ce débat. Ou bien on veut parler précisément. Et alors on doit faire peut-être encore plus attention. Si on veut parler précisément chevaleresque veut dire entendue, éminente aux lois et faits de chevalerie. Or nous savons que cette grande sainte, sans manquer proprement, sans manquer formellement aux règles de chevalerie, aux lois et faits de chevalerie, d’ailleurs fort déclinantes en ce commencement du quinzième siècle, sans se mettre en dehors de cette chevalerie déclinante n’y était non plus jamais réellement entrée. Elle était peuple et chrétienne et sainte. Elle fut très certainement en un sens une femme d’armes ; on pourrait presque dire une guerrière. Elle fut incontestablement un très grand chef militaire. On ne peut pas dire, à moins d’y tenir, à moins de vouloir parler exprès un langage bien impropre, qu’elle ait été proprement un chevalier. Le dirai-je, elle était trop profondément peuple et encore plus trop profondément chrétienne et trop profondément sainte. Ce qu’il y a d’honneur humain et on pourrait