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Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/273

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Jeanne d’Arc,… — Non seulement c’est le mot impropre qui lui vient naturellement, le mot qui fait jouer sur plusieurs plans confondus de langage, mais particulièrement entre toutes les impropriétés, entre toutes les impropriations le mot qui lui vient naturellement en matière de chrétienté c’est le mot païen. S’inspire. On s’inspire des Muses, monsieur Laudet, nous ne nous inspirons pas des saints. La liaison des pécheurs aux saints, faut-il vous le redire, n’est pas une liaison d’inspiration. Elle est une liaison de communion. Ce qui fait que l’on est ou que l’on n’est pas de chrétienté, ce n’est pas, ce n’est aucunement, — (on m’entend bien), — que l’on est plus ou moins pécheur. C’est une toute autre question, c’est un infiniment autre débat. La discrimination est tout autre. Le pécheur est de chrétienté. Le pécheur peut faire la meilleure prière. Nul n’est peut-être aussi profondément de chrétienté que Villon. Et nulle prière, je dis nulle prière de saint, ne dépasse la Ballade qu’il fit à la requête de sa mère pour prier Notre Dame. Le pécheur est partie intégrante, pièce intégrante du mécanisme de chrétienté. Le pécheur est au cœur même de chrétienté.

La question d’être ou de ne pas être pécheur, ou plutôt la question d’être plus ou moins pécheur, — (tout le monde est pécheur), — n’a absolument rien de commun, n’a pour ainsi dire absolument aucun point de contact avec la question d’être plus ou moins chrétien, et d’être chrétien ou de ne l’être pas. C’est une toute autre question, un débat infiniment autre. Et c’est un des contre sens les plus graves que l’on puisse commettre en matière de chrétienté que de les confondre, un de ceux qui marquent le mieux, et le plus instantanément, que