Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/274

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l’on n’y entend pas, que l’on n’y est pas, que l’on ne sait pas de quoi on parle. Que l’on y est totalement incompétent. Que l’on y est étranger. Nul au contraire n’est moins étranger, nul n’est aussi compétent que Villon en matière de chrétienté. Nul n’est aussi compétent que le pécheur en matière de chrétienté. Nul, si ce n’est le saint. Et en principe c’est le même homme. Je citais tout à l’heure, je faisais intervenir la Prière, la Ballade qu’il fit à la requête de sa mère pour prier Notre Dame. Que n’ai-je cité la prière rituelle elle-même, la prière liturgique que nous disons tous, pécheurs et saints confondus, et qui prévoit expressément que nous sommes pécheurs, pro nobis peccatoribus.

Le pécheur et le saint sont deux parties on peut le dire également intégrantes, deux pièces également intégrantes du mécanisme de chrétienté. Ils sont l’un et l’autre ensemble deux pièces également indispensables l’une à l’autre, deux pièces mutuellement complémentaires. Ils sont l’un et l’autre ensemble les deux pièces complémentaires non interchangeables et ensemble interchangeables d’un mécanisme unique qui est le mécanisme de chrétienté. D’un mécanisme qui ne sera jamais démonté. Mais enfin je me suis proposé précisément d’approfondir cette liaison cardinale dans ce Dialogue de l’histoire et de l’âme charnelle.

Celui qui n’est pas chrétien au contraire, celui qui n’est pas compétent en chrétienté, en matière de chrétienté, celui qui est étranger c’est celui au contraire qui n’est point pécheur, littéralement c’est celui qui ne commet aucun péché. Qui ne peut commettre aucun péché. Littéralement celui qui est pécheur, celui qui commet un péché est déjà chrétien, est en cela même chrétien.