Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/73

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§ 133. — « L’accusée, dit M. Laudet, la controversée, la discutée, c’est précisément toute Jeanne d’Arc, au moins toute celle qu’il nous est permis de connaître, parce que c’est toute la missionnaire et toute la martyre ; et Jeanne ne nous appartient que missionnaire et martyre. » — M. Laudet n’oublie qu’un point, c’est qu’à Jeanne d’Arc missionnaire et martyre ce que l’on contesta précisément, ce que l’on controversa, ce que l’on discuta, ce que l’on accusa ce fut précisément pour une très grande part, peut-être pour la plus grande part sa vie privée. Le procès de condamnation en est plein. De sa vie privée. Le procès de réhabilitation est plein des histoires de son enfance rapportées par les témoins, — publics je pense, — par les gens de son temps et de son pays.

C’est de cela même que tous les deux procès sont pleins.

§ 134. — Pareillement, éminemment Jésus naturellement ne pouvait enseigner, ne pouvait prêcher que par une prédication publique. On se demande comment il eût pu faire autrement. Prêcher, enseigner autrement. Il ne pouvait parler à son peuple, s’adresser à son peuple que publiquement. Mais qu’est-ce qu’il enseignait ainsi publiquement. Quelle était la matière de son enseignement, de sa prédication publique. La matière de son enseignement, de sa prédication publique était privée. Toutes ces histoires de calebasses, de lampes, de boisseau, de veuves, de drachmes, de péagers, de porchers, de bergers, qu’il nommait pasteurs, de bouviers, de vignerons, de publicains, de fermiers, de métayers, de petits cultivateurs, d’infirmes, de vaga-