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Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/77

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§ 138. — Qui ne voit que c’est cela précisément, — et cela seul, — qui nous donne toute sécurité. Nous avons tellement confiance dans les hommes d’État, dans les hommes publics que nous ne nous sentons pas assurés qu’une histoire est grande, ni surtout qu’elle est authentique, je dis une histoire publique, une histoire d’État, aussi longtemps que nous la voyons fondée sur leurs (seuls) témoignages, et elle-même composée, fondée d’eux ; au moins d’eux seuls. Nous ne nous sentons rassurés au contraire nous ne voulons qu’une grande histoire ait de la grandeur, et même qu’elle soit authentique, une histoire de mémoire, une histoire publique, une histoire d’État, une histoire d’histoire, que si nous sentons, que si nous savons qu’elle provient directement du peuple. Telle est la confiance que nous avons en eux et dans le public. Nous public, nous peuple, nous ne voulons que du peuple et du privé. Nous voulons qu’une grande histoire soit nourrie directement du peuple. Et une grande histoire profane et à plus forte raison une grande histoire sacrée. La confiance ne règne pas. La confiance aux publics, aux officiels, en définitive aux intellectuels. Nous voulons que toute grande histoire procède directement du peuple. Alors, à ce compte seulement nous sommes rassurés, nous la tenons pour bonne. Pour valable. Pour authentique. Non apprêtée, non feinte, non livresque. Non similaire, non imaginaire. Nous nous méfions toujours de ce qui est intellectuel et public, de ce qui vient d’intellectuel et de public, de ce qui est composé d’intellectuel et de public. Cela nous paraît toujours incurablement imaginaire, scolaire. Nous voulons toucher le fond, le rude ; le réel. Et nous avons