Page:Peguy oeuvres completes 13.djvu/86

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mais si M. Laudet avait quelque idée, quelque intelligence de ce que c’était que ce peuple de chrétienté, il saurait que cette question ne se posait ensemble pas plus pour tout le monde, pour toute cette chrétienté, il faudrait presque emprunter le langage des autres et dire : pour toute cette humanité. Elle n’était point faite comme ça. Elle n’était point d’une nature, elle n’était point faite de manière à douter de croire, à hésiter de croire. Littéralement les pécheurs n’en étaient pas plus tentés que les saints. Ce n’était pas leur genre. La tentation de ne pas croire ne devait venir qu’à de tout autres mondes, à de tout nouveaux mondes, qui sont précisément les mondes modernes.

§ 152. — Nous arrivons ici au faîte, à ce faîte de bassesse, nous atteignons à cette proposition dès longtemps annoncée, qui venait, qui venait, si scandaleusement extraordinaire que tout cœur chrétien en sera révolté dans ses sources les plus profondes. À vrai dire nous n’y parvenons pas encore d’une seule traite. Ce serait trop de courage. Nous n’y parvenons d’abord que par l’étape d’une inquiétude. « … qui n’est peut-être pas plus voisine du vrai, nous dit M. Laudet dans son français si incurablement incertain, que l’inexplicable prédestinée qu’on nous enseignait jadis. » Ou cette inquiétante, ou cette insidieuse phrase ne veut rien dire, ce qui me paraît tout de même un peu difficile, ou qu’est-ce que c’est que cette inexplicable prédestinée qu’on nous enseignait jadis et qui n’était pas voisine du vrai.

§ 153. — N’en doutons point. Cette inexplicable prédestinée qu’on enseignait jadis à M. Laudet et que