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le vice suprême


v

gaga

Dans la bibliothèque où le trio professoral passait tout son temps, Sarkis disait à Warke :

— « Tuteur et pupille sont présentement logés à la même enseigne, à la tentation : tandis que Leonora se débat contre son tempérament, Torelli s’acoquine avec une française, une de celles qu’on nomme tendresses et croqueuses de cœur, à Paris. Vous verrez que la jeune fille restera pure et que l’homme mûr et d’expérience croulera dans le jupon sale, et laissera jusqu’à sa dignité, dans un pli de cette chemise tant de fois et par tant de gens troussée. »

— « Vous m’étonnez, » fit l’allemand, « et… »

— « Mon cher assembleur de nuages harmoniques, vous rêvez trop pour rien voir… Torelli a commencé par la passion, il finit par la lubricité. La sentimentalité qui, jeune, le faisait platoniquement soupirer pour Marie-Béatrix, s’est changée avec l’âge en sensualité, et ceux de ses fermiers qui ont une jolie fille peuvent l’envoyer, les mains vides, payer les redevances. Aux Cascines, j’ai vu sa maitresse, une française absurde ; pas de visage, une frimousse si chiffonnée qu’elle n’a pas de traits ; de petits yeux rusés et niais qui papillotent dans le glacis du maquillage qui est sa peau ; un embonpoint mou, et de ses cheveux de caniche à son déluré de grisette, l’accent de la fille de portière qui du café-concert de banlieue a sauté dans