Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/103

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vie de famille, l’heure passe dans le sablier et entre dans la maison.

Plus tard, elle émigre du sablier dans l’horloge, elle défile sur le cadran, elle sonne au sommet du clocher, comme si, avec l’accroissement de la vie dans l’humanité, elle avait besoin de prendre plus de vie aussi et de chanter dans l’espace.

Le progrès a trouvé la règle du temps, c’est bien ; mais il a fait seulement la moitié de sa tâche si, la nuit, en tombant, condamne l’homme à l’immobilité.

Le soleil disparaît au couchant et emporte avec lui son rayon. La source coule de plaine en plaine et emporte de fleur en fleur son murmure. Comment appeler et retenir à domicile ces deux choses fluides et insaisissables, l’eau et la lumière ?

L’homme ramasse à terre une poignée d’argile, il la moule, et le secret est trouvé. Il possède l’amphore. Il presse la grappe ; la flamme électrique du vin pétille et la coupe, passée à la ronde dans le festin, propage de lèvre en lèvre l’enthousiasme de la sympathie.

Or, pendant que la jeunesse attardée à table renoue le pacte d’amitié dans la joie et l’effusion du banquet, une jeune fille, belle comme la Grèce, grave comme la muse, entre discrètement, sur la pointe du pied, dans la chambre d’une maison écartée, là-bas sous le platane, à l’extrémité de la cité. Elle verse l’huile d’olive dans la lampe posée sur le trépied, ranime du doigt la mèche à moitié éteinte et regagne silencieusement la porte,