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Page:Pelletier - Mon voyage aventureux en Russie communiste, 1922.djvu/72

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mon voyage aventureux

Luxembourg resplendissant dans leurs cadres noirs, vrais bijoux au milieu de cet intérieur sordide.

Mais il faut se remettre en marche. J’avais trop présumé de mes forces, mes deux semaines de claustration et d’émotion m’ont beaucoup affaiblie : je suis très fatiguée ; mais il faut marcher, il n’y a pas.

Le jour commence à poindre. Comme il vient tôt. C’est que je ne la désire pas, cette aurore que j’appelais autrefois durant les longues nuits de maladie. Maintenant c’est la nuit que j’aime, la nuit bien noire pour me dérober à la méchanceté des hommes. Mais quelque chose brille à mes pieds, qu’est-ce donc, ah, un fer à cheval.

D’ordinaire, je ne suis pas superstitieuse, je vis dans le présent et ne prends pas grand souci des malheurs à venir. Mais je suis tellement déprimée en ce moment que je vois dans cet objet un gage de salut, je le ramasse.

Nous arrivons une heure trop tôt à la petite gare. Dans un coin de la salle d’attente, très vaste pièce meublée de quelques bancs de bois est un mobilier en déménagement. Une jeune femme est là qui donne ses soins à un enfant malade couché sur un lit tout installé. À terre traînent des casseroles, la lampe, le moulin à café. Que fait là cette femme ? je n’ai pas le loisir de l’approfondir. Pas d’incidents dans le train, mais à X, c’est une cohue pour sortir de la gare et voilà qu’on crie :