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LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE AU XIXe SIÈCLE.

les éléments de la comédie et de la tragédie, qui s’ouvre même aux échappées du lyrisme, qui est, en un mot, « la poésie complète » ; on eut, non pas des élégies, des odes, des idylles, des épîtres ou des satires, mais des Méditations, des Harmonies, des Orientales, des Voix intérieures, recueils où se mêlent et se confondent tous les genres, et dont le titre se rapporte, non pas aux divisions factices de la rhétorique, mais à une large unité qui a son siège dans l’âme même du poète.

Sans méconnaître les droits imprescriptibles de la raison, que le classicisme avait fini par réduire à je ne sais quel bon sens timide et froid, les romantiques ont revendiqué ceux de l’imagination, à défaut de laquelle la poésie demeure incapable de prendre l’essor. La nouvelle école a vu dans le « goût », non plus l’inspirateur, mais le modérateur du poète. Elle l’a d’ailleurs élargi et assoupli : c’est un goût hospitalier et tolérant, empressé, non pas à critiquer toujours les mêmes défauts, mais à trouver des beautés nouvelles.

Comme le disait son chef, le romantisme fut dans la poésie ce qu’était le libéralisme en politique. Il l’affranchit des formules oppressives et des serviles imitations. Il la vivifia d’un souffle nouveau, lui donna des ailes, et la lança, toute frémissante d’enthousiasme, dans ces régions supérieures où elle plane librement au-dessus des conventions.