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CHAPITRE V

LE THÉÂTRE

En faisant du drame une représentation complète de la vie humaine, le romantisme avait prétendu le substituer aux deux genres entre lesquels l’ancienne poétique maintenait une sévère distinction : le drame, qui fondait l’élément comique avec l’élément tragique, devait, dans la pensée de ceux qui en furent les créateurs, remplacer la comédie aussi bien que la tragédie. La tragédie classique, dont les formes étaient en désaccord manifeste avec notre société telle que la Révolution l’avait faite, ne put se maintenir contre le nouveau genre, auquel elle abandonna presque aussitôt la scène ; et quand, moins de quinze ans après, la chute retentissante des Burgraves sembla lui laisser le champ libre, elle ne reconquit momentanément le public, par l’effet dune réaction inévitable contre les excès du romantisme, qu’en demandant au romantisme lui-même les moyens de se rajeunir. Mais, s’il n’y avait désormais pour le genre tragique d’autre forme vivante que celle du drame, le drame, quelque part qu’il fît au comique, ne pouvait remplacer la comédie. Victor Hugo avait parlé de compléter l’un par l’autre Corneille et Molière. Qui ne voit ce qu’il y a de contradictoire dans une telle prétention ? Les romantiques pouvaient bien mêler le rire aux larmes, faire